Les chasseurs Clovis ont effectivement existé. Les seules traces de cette ancienne culture qui ont survécu jusqu'à nos jours sont des pointes de lances, des outils de pierre et des os d'animaux qu'on a découverts un peu partout en Amérique du Nord. On sait qu'ils chassaient le gros gibier comme le bison et le mammouth. Ils ont très probablement joué une rôle important dans la disparition de plusieurs mammifères géants du continent. Mais ces gens sont-ils vraiment les seuls ancêtres des peuples amérindiens? Auraient-ils pu envahir ce gigantesque continent, de l'Alaska au Chili, en une très courte période de temps? Leur langue aurait-elle pu se diversifier en un si grand nombre de langues qui ne démontrent souvent plus aucun lien de parenté? Et que dire des tests d'ADN qui ne démontrent aucune filiation entre certains groupes? | Pointe Clovis |
L'Amérique du Nord préhistorique |
1. Le pont intercontinental
La théorie traditionnelle de la migration via le détroit de Béring dépend de deux conditions. Premièrement, elle suppose que le très bas niveau de la mer ait créé un passage entre la Sibérie et l'Alaska. On sait de source sûre que c'était effectivement le cas. Les humains n'auraient d'ailleurs pas été les premiers à emprunter ce pont naturel. Plusieurs espèces d'animaux dont les mammouths et les caribous l'auraient fait avant eux. La deuxième condition est l'existence d'un étroit corridor à travers le grand glacier qui recouvrait alors tout le Canada et qui aurait permis à ces voyageurs d'atteindre les plaines américaines. Des tests ont démontré que les plus anciennes traces d'occupation humaine en Amérique datent d'il y a environ 17 000 ans. Or, à cette époque, le fameux corridor permettant de traverser le glacier n'existait pas encore. Il n'est apparu que 3000 ans plus tard! Les dates ne coincident pas du tout. |
La plus récente théorie est celle qui suppose une migration humaine venue d'Europe. Des scientifiques ont découvert de surprenantes similitudes entre la culture Clovis d'Amérique du Nord et la culture des Solutréens qui occupaient le nord de l'Espagne il y a environ 19 000 ans. De récentes études ont également permis de découvrir des similitudes génétiques entre certaines populations amérindiennes et européennes, caractéristiques qui n'existent pas chez les Asiatiques. Cette hypothèse suppose donc que des Solutréens auraient été capables de suivre en bateau les côtes de l'ancien glacier qui recouvrait l'Atlantique Nord, se nourrissant peut-être de poissons en chemin. | Migration possible des Solutréens |
Reconstruction du visage de l'homme de Kennewick |
C'est possible. Après tout, on sait de source sûre que les premiers humains ont atteint l'Australie en bateau il y a au moins 40 000 ans! On sait aussi que les premiers Européens étaient capables de naviguer jusqu'aux îles de la Méditerranée il y a au moins 14 000 ans. Pourquoi les Solutréens n'auraient-ils donc pas été capables de faire de même? On sait aussi que lors de la dernière ère glaciaire, il y a 18 000 ans, la presque totalité de l'Europe était recouverte de glaciers. La compétition pour des terres habitables devait être très féroce et certaines populations auraient pu êtres tentées d'aller voir ailleurs.
En 1996, deux étudiants firent la découverte d'un squelette dans l'état de Washington aux États-Unis. Le squelette était en excellente condition et les premières observations du crâne révélèrent qu'il s'agissait d'un homme d'origine européenne. On découvrit alors le bout d'une ancienne pointe de lance dans l'os de la hanche, ce qui souleva plusieurs interrogations quant à son âge. À la surprise générale, la datation du squelette révéla que celui-ci était vieux d'environ 9460 ans! On a baptisé cette incroyable découverte «l'homme de Kennewick». |
L'homme de Kennewick était d'âge moyen et mesurait environ 5 pieds 10 pouces. Ses os montrent des traces de plusieurs blessures aux hanches, aux côtes, au front et au coude gauche. En se servant d'un moule du crâne, les anatomistes James C. Chatters et Thomas McClelland ont reconstruit, muscle par muscle, le visage de l'homme de Kennewick. Une fois la reproduction terminée, le visage montre des traits étrangement européens. L'ajout des cheveux et de la barbe nous révèle l'apparence possible de ce visiteur d'un lointain passé. Serait-ce la preuve d'une ancienne migration européenne en Amérique du Nord? | L'homme de Kennewick |